La reconnaissance, début janvier, de l’indépendance de l’Église orthodoxe d’Ukraine unifiée, par le patriarcat œcuménique de Constantinople, exacerbe les relations déjà extrêmement tendues entre Kiev et Moscou. Quant aux autres Églises autocéphales, elles semblent éviter soigneusement de prendre position.
La volonté d’une partie des orthodoxes ukrainiens de se doter d’une représentation religieuse libérée de la tutelle du patriarcat de Moscou ne date pas d’hier : elle s’exprime ouvertement dès la chute de l’URSS et la naissance de l’Ukraine indépendante, en 1991. Aussi, quand le 5 janvier dernier, à Istanbul, le patriarche Bartholomée Ier de Constantinople, primus inter pares parmi les chefs des Églises orthodoxes mondiales, signe le tomos, le décret octroyant l’autocéphalie (indépendance tant juridique que spirituelle) à l’Église d’Ukraine unifiée, il s’agit d’un jour historique. Le lendemain, le chef de la nouvelle entité religieuse, le métropolite Épiphane, reçoit des mains de Bartholomée le bâton pastoral et le fameux tomos, roulé comme un ancien parchemin, en présence d’une importante délégation d’officiels venus de Kiev, conduite par le président Petro Porochenko en personne. Le 7 janvier, le tomos fait un premier voyage en Ukraine : il est exposé, pendant la messe du Noël orthodoxe, dans la cathédrale Sainte-Sophie de Kiev. Le 8, le précieux document retourne à Istanbul, pour être une dernière fois vérifié, puis signé, par tous les membres du Synode du patriarcat œcuménique. Aujourd’hui, le tomos est revenu à Kiev, où il sera conservé dans l’église-réfectoire du monastère médiéval Sainte-Sophie, accessible au public.
La deuxième église du monde orthodoxe
Jusque récemment, l’Ukraine comptait trois églises concurrentes : l’Église orthodoxe ukrainienne du patriarcat de Moscou (affiliée à sa « grande sœur » russe), l’Église orthodoxe ukrainienne du patriarcat de Kiev et l’Église orthodoxe autocéphale ukrainienne – toutes deux non reconnues par Moscou. Pour se voir enfin accorder l’autocéphalie, ces dernières devaient fusionner : il s’agissait d’une condition sine qua non pour le patriarcat de Constantinople. Elles y parviennent le 15 décembre dernier, à l’issue d’un « concile unificateur » tenu à Kiev.

Depuis cette « fusion », l’Ukraine ne compte donc plus que deux Églises orthodoxes : celle soutenue par le patriarcat de Constantinople, et celle attachée au Patriarcat de Moscou.
Pour l’heure, la seconde compte encore deux fois plus de fidèles que la première. Mais, selon de nombreux observateurs, cette proportion pourrait bientôt s’inverser. Philarète, ex-métropolite de Kiev, nommé patriarche honorifique de la nouvelle église unifiée, en est d’ailleurs convaincu : cette dernière est vouée à devenir la deuxième Église autocéphale, derrière celle de Russie, et à « jouer au sein de la communauté orthodoxe mondiale un rôle à la mesure de cette position ». « L’Ukraine va se renforcer au travers de son Église »,
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Jean-Claude Galli(envoyé spécial à Kiev) et Svetlana Solodovnik